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Impressions d'écrivain au coeur de la France profonde... en résonance avec le monde

ETE EN AUTOMNE : auteurs en campagne...

Publié le 7 Décembre 2018 par Marie-Hélène Chiocca in Festival, Festival Eté en Automne, Facteur Théâtre, Auteur Invité, Théâtre, Champagne- Ardennes, Alberto Lombardo, Didier Lelong

Le petit catalogue de la 10ème édition, en souvenir...

Le petit catalogue de la 10ème édition, en souvenir...

Au collège Jean Moulin, après la lecture de Rowd'Addict par Alberto Lombardo et Leila Miloudi.

Au collège Jean Moulin, après la lecture de Rowd'Addict par Alberto Lombardo et Leila Miloudi.

Le 29 novembre dernier, je faisais partie des douze auteurs invités par Didier Lelong et son facteur théâtre pour la dixième édition de l'Eté en automne qui occupe pendant un mois les territoires de la Marne, de la Meuse et des Ardennes.

Un rayon de soleil a bien voulu filtrer pendant les trois jours et il n'a pas fait trop froid. Il fallait se réchauffer ailleurs : dans les petites salles, au Collège Jean Moulin, dans les gîtes offerts.

Ces rendez-vous sont toujours l'occasion de rencontres entre auteurs et avec le public, et c'est leur principale vertu. Pour ma part, j'ai eu la chance que mon texte Rowd'Addict soit pris en main par Alberto Lombardo ( auteur associé au Facteur Théâtre) et Leila Miloudi.

Le public était une classe de 4ème, autant dire un public difficile. Mais rencontrer le public est toujours un plaisir... le texte a été écouté silencieusement. Autant dire qu'il a passé l'épreuve du feu...

ROWD 'ADDICT, la pièce choisie

Rowd’Addict est l’histoire d’un ado surdoué en relation avec une intelligence artificielle. Entre le père et l’ado surdoué aucune communication possible. Une psy vient aider le jeune homme considéré comme « addict ».    Autour du thème de l’Intelligence Artificielle et de la relation à la technologie se pose la question de la relation à l’autre. Quel rôle joue la machine - Rowda - dans la vie de cet ado? Palliatif ? Objet de puissance ? Outil de découverte ?      Cette pièce courte explore tout autant le thème de la place donnée à la technologie que notre capacité à communiquer et à définir qui l’on est.  Elle interroge aussi les contours de « l’humain » quand la science conduit en terre inconnue.

Rowd’Addict est l’histoire d’un ado surdoué en relation avec une intelligence artificielle. Entre le père et l’ado surdoué aucune communication possible. Une psy vient aider le jeune homme considéré comme « addict ».    Autour du thème de l’Intelligence Artificielle et de la relation à la technologie se pose la question de la relation à l’autre. Quel rôle joue la machine - Rowda - dans la vie de cet ado? Palliatif ? Objet de puissance ? Outil de découverte ?      Cette pièce courte explore tout autant le thème de la place donnée à la technologie que notre capacité à communiquer et à définir qui l’on est.  Elle interroge aussi les contours de « l’humain » quand la science conduit en terre inconnue.

Extraits

(...)

LA FEMME : Bon. Je reprends la question précédente. Parlez-moi de Rowda.

SIMON : ...

LA FEMME : On peut la voir ?

SIMON : Non

LA FEMME : Pas d’images ?

SIMON : Non

LA FEMME : Vous ne voulez pas qu’on allume ?

SIMON : Ça servira à rien.

LA FEMME : J’aimerais bien la voir. Je pense que ce serait bien.

SIMON : Elle n’est plus là.

LA FEMME : Comment ça ?

SIMON : Je n’y ai plus accès.

LA FEMME : Comment ça, vous n’aviez plus accès !

SIMON : Elle ne répond plus. Elle ne veut plus me répondre.

LA FEMME : Ce n’est pas possible.

SIMON : Si.

LA FEMME : C’est qui, c’est quoi Rowda exactement ? Qu’est-ce qui s’est passé ? Dites-moi.

SIMON : C’est un robot intelligent personnel ; je l’ai créée il y a deux ans. Je l’ai nourrie de mes propres neurones. Je lui ai tout appris. Tout ce que je savais et tout ce que je ne savais pas encore. Je lui ai fait avaler la bibliothèque de mon père, toute sa littérature et aussi des livres de science, des revues scientifiques. Elle a tout avalé. Même les Evangiles, la Thora et le Coran.

LA FEMME : Et ça sert à quelque chose ?

SIMON : Vous n’êtes pas une Rowda ; vous ne poseriez pas la question. A Rowda tout servait ; pour comprendre comment nous fonctionnons nous

humains. Elle a commencé à me donner des réponses que j’avais pas. Je l’ai interrogée de plus en plus. Elle me répondait toujours. Elle avait toujours une réponse.

LA FEMME : C’est ça que vous vouliez, avoir toutes les réponses ?
SIMON : Non. Pas toutes les réponses. Juste aux questions que je me pose

moi.
LA FEMME : Par exemple ?

SIMON : Vous êtes stupide ou quoi ? Rowda, elle m’a servi à tout. Le français, ça m’intéresse pas.. Mais la physique, c’est mon truc.

LA FEMME : Qu’est-ce que ça changeait alors de lui poser des questions ?

SIMON : A poser de nouvelles questions. A aller toujours plus loin.
LA FEMME : On ne peut pas essayer ?
SIMON : Non, elle est éteinte.

LA FEMME : Rallumez–la !

SIMON : Elle ne veut pas.

LA FEMME : Comment ça, elle ne veut pas ?

SIMON : Je ne peux plus l’allumer, c’est elle qui refuse.

LA FEMME : Y a peut-être un problème électrique ou de connexion tout simplement ?

SIMON : Non, ce serait trop facile ; elle agit directement sur le programme électrique. Elle a coupé la fonction d’ouverture.

LA FEMME : Vous ne pouvez pas trouver un moyen.
SIMON : J’ai essayé. De toute façon, je sais qu’elle ne veut plus me parler.

...

ET PUIS AUSSI

Quelques photos autour des événements, dont la pièce " Francis Blanche et en couleurs : le parti d'en rire ! " de D.Lelong. Parmi les visages Jean-Pierre Thiercelin, Dominique Paquet, Didier Lelong, Patrice Vion, Alberto Lombardo et le musicien Stéphane Guilbert.
Quelques photos autour des événements, dont la pièce " Francis Blanche et en couleurs : le parti d'en rire ! " de D.Lelong. Parmi les visages Jean-Pierre Thiercelin, Dominique Paquet, Didier Lelong, Patrice Vion, Alberto Lombardo et le musicien Stéphane Guilbert.
Quelques photos autour des événements, dont la pièce " Francis Blanche et en couleurs : le parti d'en rire ! " de D.Lelong. Parmi les visages Jean-Pierre Thiercelin, Dominique Paquet, Didier Lelong, Patrice Vion, Alberto Lombardo et le musicien Stéphane Guilbert.
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Quelques photos autour des événements, dont la pièce " Francis Blanche et en couleurs : le parti d'en rire ! " de D.Lelong. Parmi les visages Jean-Pierre Thiercelin, Dominique Paquet, Didier Lelong, Patrice Vion, Alberto Lombardo et le musicien Stéphane Guilbert.
Quelques photos autour des événements, dont la pièce " Francis Blanche et en couleurs : le parti d'en rire ! " de D.Lelong. Parmi les visages Jean-Pierre Thiercelin, Dominique Paquet, Didier Lelong, Patrice Vion, Alberto Lombardo et le musicien Stéphane Guilbert.
Quelques photos autour des événements, dont la pièce " Francis Blanche et en couleurs : le parti d'en rire ! " de D.Lelong. Parmi les visages Jean-Pierre Thiercelin, Dominique Paquet, Didier Lelong, Patrice Vion, Alberto Lombardo et le musicien Stéphane Guilbert.
Quelques photos autour des événements, dont la pièce " Francis Blanche et en couleurs : le parti d'en rire ! " de D.Lelong. Parmi les visages Jean-Pierre Thiercelin, Dominique Paquet, Didier Lelong, Patrice Vion, Alberto Lombardo et le musicien Stéphane Guilbert.
Quelques photos autour des événements, dont la pièce " Francis Blanche et en couleurs : le parti d'en rire ! " de D.Lelong. Parmi les visages Jean-Pierre Thiercelin, Dominique Paquet, Didier Lelong, Patrice Vion, Alberto Lombardo et le musicien Stéphane Guilbert.
Quelques photos autour des événements, dont la pièce " Francis Blanche et en couleurs : le parti d'en rire ! " de D.Lelong. Parmi les visages Jean-Pierre Thiercelin, Dominique Paquet, Didier Lelong, Patrice Vion, Alberto Lombardo et le musicien Stéphane Guilbert.

Quelques photos autour des événements, dont la pièce " Francis Blanche et en couleurs : le parti d'en rire ! " de D.Lelong. Parmi les visages Jean-Pierre Thiercelin, Dominique Paquet, Didier Lelong, Patrice Vion, Alberto Lombardo et le musicien Stéphane Guilbert.

Le récit de Gilles Boulan - auteur invité

ET

La Chronique du Marché de GILLES BOULAN

REVIGNY SUR ORNAIN Mercredi 28 novembre.

Sur la place du marché, le soldat peint en bleu du Monument aux morts dresse une couronne de lauriers à la glorieuse mémoire des enfants de Revigny-sur-Ornain tombés au champ d’honneur. La couleur vive de sa vareuse et le rose pâle de son visage contrastent avec la grisaille automnale du ciel et avec les teintes sombres de la végétation voisine. Néanmoins, sa présence rappelle aux rares passants qu’ils se trouvent dans la cité natale du célèbre Maginot, inventeur de la ligne qui n’a guère fait ses preuves et dont le mémorial se dresse à quelques centaines de mètres, en face du Café entre deux ponts.

C’est aujourd’hui jour de marché et la pluie insistante a dissuadé nombre d’habitants à se rendre sur la place pour s’approvisionner auprès des quelques marchands forains qui ont bravé le mauvais temps. Traiteur, poissonnier, rôtisseur et marchand de légumes attendent avec inquiétude le client en surveillant d’un oeil perplexe l’aménagement de notre étal par les employés de la ville. Ces derniers manifestent une visible efficacité pour édifier une petite cabane de planches, indispensable refuge où les lectures se succéderont à l’abri des intempéries. Ils en soignent le confort à l’aide d’un mobilier sommaire, le dotent d’un éclairage aux vertus caloriféres puis lui adjoignent deux tentes pliantes, disposées en auvent en prolongement de l’entrée. Sous ce chaleureux parapluie seront bientôt dressées des tables, dépliés quelques bancs humides, offert un café chaud aux futurs spectateurs. Didier ajoute la dernière note à cette installation de fortune en y suspendant une banderole au nom de l’Eté en Automne.

Mais en dépit de la diligence manifestée par chacun, les chaussures ont déjà pris l’eau et la fraîcheur s’est engouffrée sous les manteaux et les écharpes. La pluie ne cède aucun pouce de terrain, le public ne se bouscule pas aux portes du théâtre précaire et le moral, comme l’affirme avec à propos l’expression, est réellement dans les chaussettes, lesquelles sont détrempées et glacées. Inutile d’être détenteur de la prestigieuse médaille Fields pour dénombrer sur le marché plus d’auteurs et de lecteurs que de chalands devant les choux fleurs ou les poulets rôtis. Les manuscrits eux-même commencent à le réaliser, à en devenir humides et à se vider de leur enthousiasme. Le désolant constat ne dispose pas, on le comprend, à un optimisme débridé.

Mais on croirait que la pluie se fait soudain moins insistante et miraculeusement, une dame accepte de pénétrer sous le chapiteau improvisé. Avec le tact qu’on lui connaît, Alberto lui propose un café et offre à cette première auditrice volontaire, le choix entre diverses marchandises allant des blouses de ménagère jusqu’aux pinceaux et saucissons en passant par les plus classiques radis, tomate et pomme de terre. La dame hésite, finit par opter pour le dialogue des blouses avant de suivre Viviane et Leila qui lui lisent la courte pièce écrite par Jean-Pierre: une chronique mélancomique de la transformation d’un monde rural.

A peine ont-elles achevé la lecture, avec une chanson de Jonasz qui parlent de blues et non de blouses, que les élèves d’une classe de collège se présentent à leur tour, en compagnie de leur professeur. Ils se pressent sous la tente, évitant les gouttières et comme ils sont une bonne quinzaine, ils ont le droit à plusieurs choix. Au mélange des pinceaux imaginé par Didier qui oppose le fluet Traînard, artiste aquarelliste, et l’obèse Queue de morue, forçat du bâtiment, succède la comédie musicale orchestrée par Leila. On y découvre un radis vedette, répondant au doux nom de scène de Pinky Radis, en train de s’époumoner sur un pastiche de Bellavoine devant un parterre de fans (de radis bien évidemment) tandis qu’un détracteur conscient de leur condition végétale réclame la suppression des bottes. Enthousiastes, les collégiens réclament un troisième choix : ils veulent entendre les saucissons. Et en effet, la pièce mitonnée par Nicole donne la parole à trois d’entre eux. Sur l’éventaire d’un charcutier, Saucisson d’âne et Saucisson de porc s’entendent comme cochons en foire pour dénigrer Saucisson Vegan, cet étranger usurpateur qui ne fait pas partie de leur monde. L’étonnement de nos jeunes auditeurs se mêle à leur amusement et à leur intérêt manifeste. Ils ne perdent pas un mot de ces surprenants dialogues qui ne figurent assurément pas dans leurs manuels scolaires.

Mais bientôt, un inattendu deux-roues fait une apparition remarquée sur la place un peu moins déserte. C’est le tandem des facteurs venus délivrer aux passants qui n’en demandent pas tant, des lettres d’amour lues à haute voix par les diligents préposés. Une dame d’un certain âge subit avec une certaine réticence une déclaration enflammée et ponctue les élans du coeur par des “C’est pas bientôt fini ?” et autres “Je vais rater mon car”. La prof des collégiens s’entend chanter L’été indien devant ses élèves hilares. “ On ira Où tu voudras Quand tu voudras
Lorsque l’amour sera mort...”

Puis c’est au tour des commerçants d’être pris à parti par nos infatigables facteurs. Le poissonnier se voit remettre une lettre de rupture signée par un amant dépité et le vendeur d’oeufs réplique à l’écoute de la signature de sa correspondante amoureuse : “Catherine, c’est le prénom de la soeur de mon épouse”... L’ambiance se dénoue et une franche bonne humeur gagne parmi les étals tandis que Patrice et Fabrice reprennent leur vélo et leur précieuse correspondance pour aller porter leur message dans une boulangerie du bourg.

Cependant, les lectures qui n’ont pas connu de trêve se poursuivent sans relâche dans la petite cabane où depuis longtemps, il ne pleut plus. On y entend une jeune tomate passablement vindicative et une vieille patate philosophe se disputer à propos de la poésie de Shakespeare comparé aux slogans proférés par une marchande de moules. On y écoute à plusieurs reprises et dans des distributions différentes, chacune des cinq ou six pièces à l’affiche de ce théâtre de lecture où le spectateur réjoui se retrouve seul devant les comédiens. L’émotion est patente tant pour ceux qui agissent que pour ceux qui écoutent. Petit moment de magie volé à l’ordinaire d’un marché de village sous une pluie d’automne et qu’une spectatrice enthousiaste résume avec une formule pertinente : “C’est formidable d’offrir ainsi du bon temps aux gens”.

La dernière lecture est donnée sous l’auvent du traiteur à l’adresse de sa patronne en train de nettoyer ses grands plats de couscous, de cassoulet et de paella. Et pour remercier les lecteurs, elle offre à la compagnie une partie de ses invendus tandis que le poissonnier propose une ristourne sur un achat de cabillaud. Gestes de sympathie, voire de reconnaissance, qui traduisent simplement une vérité éprouvée: le théâtre a sa place aussi sur les marchés et les nourritures spirituelles ne font pas concurrence au commerce de l’alimentaire. “Il faudra revenir” suggèrent plusieurs auditeurs.

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